Back to the future Part IV

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« So this one’s for the dreamers
Who have the guts to risk it
To take a chance on what they think;
Can’t stare them down ‘cause they don’t blink »

Il suffit d’emprunter le Tube pour comprendre que le musical, qui ne se traduit ni par music-hall ni par opéra-rock, est agressivement présent dans la vie londonienne. On ne reviendra pas sur cette tradition qui mène parfois à faire n’importe quoi, c’est-à-dire à mettre en musique du patinage à roulettes pour appeler ça Starlight express ou à exploiter le décès de Michael Jackson sans délai de décence, ni sur la consanguinité artistico-commerciale avec l’industrie scénique de Broadway. On pourrait en revanche s’étonner du vivier de talents sur lequel repose le système, d’autant que tous les âges y sont représentés, et que la plasticité artistique y est pour ainsi dire un prérequis. On pourrait aussi s’étonner de la facilité qui consiste trop souvent à tenter le coup de la licence, autrement dit à s’inspirer d’un succès cinématographique pour parfois plus l’exploiter que l’adapter, et surtout le vendre à grands renforts de slogans empruntés à une critique hyperbolique. Car contrairement à ce que pense la Walt Disney Company, dont le Lion king: The musical date pourtant de 1997, un live n’est pas un dessin animé avec des acteurs en chair et CGI. Le projet d’adapter Back to the future sur scène paraissait donc aussi dangereux qu’opportuniste, à l’heure où les années quatre-vingts ont fait Stranger things, et compte tenu d’une matière première dont la pop music signature ne raconte pas grand-chose.

Chez ceux qui auront entendu parler du projet du trio Ballard-Gale-Silvestri, l’inquiétude se focalisera peut-être sur la machine à voyager dans le temps : sera-t-elle là, simple décor, mieux qu’un accessoire ? Le fan ou le sourcilleux ajouteront sûrement d’autres degrés, comme on fait en sport quand on voit un champion gagner contre toute attente, mais qu’on ne l’imagine pas s’arrêter en si bon chemin… Roulera-t-elle, volera-t-elle, verra-t-on les 88 miles à l’heure ? La réponse tient dans une seule chanson, et même dans une simple parole : « The fact is no one does it better than we do! »

Dès l’entrée dans l’amphithéâtre de l’Adelphi Theatre, le spectateur est accueilli par un décor qui déborde la scène, et rappelle l’interdiction de photographier le spectacle. Car on était presque à Hill Valley en 1955 l’instant d’avant, mais on est maintenant entre deux, et on n’attend plus que d’être porté dans le film. Le rappel faisant des portables un anachronisme en 1985 est un symbole, celui de l’intégration annoncée par les panneaux du hall d’accueil, ou de la confusion orchestrée entre la rue et la scène qui s’enflammera sur la fin. Tout aura soit l’évidence du métrage et de ses répliques efficaces comme ses articulations, soit la finesse d’astuces ou d’entorses rusées, comme le remplacement du danger des terroristes libyens par celui d’une irradiation. Aucun des passages obligés n’est contourné et les tours de force sont nombreux, les trucs technologiques s’associant parfaitement à des procédés plus classiques ou des tours de magie, quand les chansons neuves font l’effet de broderies s’associant aux dialogues comme aux titres attendus. Tout marche bien au point que les clins d’œil à Star Wars ou Doctor Who coulent de source, tout marche si bien qu’on se demande même si cette version scénique n’est pas la suite que méritait le film, alors qu’il s’agit seulement d’une variation capitalisant au mieux sur les ressources du cru.

Crédits photos : Universal City Studios, Inc./U-Drive Joint Venture, LW Theatres Group Limited, a3660media, Rapha62, The New York Times Company

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